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- 1972 / 1984 -
"La famille Nothomb quitte Kobe pour Pékin: "Nous sommes gardés par des soldats. Défense de parler aux gens. Si l'on discute avec un Chinois, on ne le revoit plus jamais. Je suis toute petite, mais déjà je réalise que quelque chose ne va pas." Et puis New York, trois ans plus tard. Formidablement excitant. Les fillettes [Amélie et sa soeur, Juliette] s'émerveillent de rues où une majorité de Blancs vont librement. Mais leur père, en poste à l'ONU, s'ennuie de trop de bureaucratie. Direction le Bangladesh. Plongée dans l'horreur : cadavres de personnes mortes de faim dans les rues, misère à l'état pur. Les parents passent leurs week-ends dans une léproserie. Refusant de voir tant d'abomination, les filles lisent, interminablement." "Pékin sentait le vomi d'enfant. Boulevard de la Laideur Habitable, il n'y avait que le bruit du galop pour couvrir les raclements de gorge, l'interdiction de communiquer avec les Chinois et le vide effroyable des regards." "Ma mère a toujours eu le caractère le plus heureux de l'univers. Le soir de notre arrivée à Pékin, la laideur l'a tellement frappée qu'elle a pleuré. Et c'est une femme qui ne pleure jamais. Bien sûr, il y avait la Cité Interdite, le Temple du Ciel, la Colline Parfumée, la Grande Muraille, les tombes Ming. Mais ça, c'était le dimanche. Le reste de la semaine, c'était l'immondice, la désespérance, la coulée de béton, le ghetto, la surveillance - autant de disciplines dans lesquelles les Chinois excellent." |
| Amélie Nothomb - Le sabotage amoureux - ©-Albin Michel 1993. |